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Brève histoire de notre UFR
Des enseignements juridiques ont été assurés sur le site de Nanterre à partir de 1966 ; ils étaient dispensés dans le cadre d’une annexe de la Faculté de doit de Paris. C’est à l’action et à la force de conviction de Jean-Maurice Verdier, que l’on doit l’affirmation de la faculté de droit et de sciences économiques de Nanterre par rapport à Paris Centre.
Cette décision, prise par les instances provisoires que l’on avait mises en place pour préparer les suites de mai 1968, n’avait rien de symbolique ; elle répondait à des enjeux concrets, dans la mesure où elle traduisait les divergences sur la politique universitaire qui s’étaient fait jour entre les deux entités antérieurement liées. Alors que les juristes parisiens se raidissaient de plus en plus sur des positions hostiles aux novations apportées par la nouvelle loi sur l’enseignement supérieur, Nanterre entendait clairement marquer sa volonté de s’inscrire dans le mouvement impulsé par celle-ci : partage du pouvoir universitaire et substitution au vieux modèle oligarchique traditionnel d’une gestion plus participative, donnant des responsabilités à toutes les catégories composant la communauté universitaire, et notamment aux étudiants ; mise en place de nouvelles formes pédagogiques, en particulier avec l’apparition du contrôle continu … Dans celle logique, la transformation de la faculté en Unité d’enseignement et de recherches et son intégration au sein de la nouvelle université de Paris X Nanterre allaient logiquement de soi.
Partie intégrante de l’université de Nanterre, l’UER de droit allait en accompagner l’évolution et partager d’autant plus toutes les vicissitudes qui accompagnaient son développement qu’elle en constituait, de par son importance, une partie essentielle. Elle allait être le théâtre de violences, liées aux oppositions internes entre les étudiants nanterrois, mais aussi aux tentatives d’intrusions d’étudiants venus d’autres universités parisiennes. Les heurts avec la police y ont parfois été graves et il a fallu tout le sang-froid des autorités décanales pour éviter le pire. Mais les difficultés allaient aussi prendre d’autres formes, à partir de 1975, avec l’arrivée au ministère d’Alice Saunier-Seïté, puis celle de Jean-Maurice Verdier à la présidence de l’université, et l’UER de droit allait, comme le reste de l’université, être l’objet de diverses manifestations d’hostilité de la part de la ministre.
Celle-ci devait prendre, à l’égard de l’UER de droit, des formes spécifiques. S’appuyant sur la volonté manifestée par la majorité des professeurs de droit de quitter Nanterre, le ministère allait organiser la scission, en créant une nouvelle UER de droit à Malakoff, rattachée à l’université de Paris V. L’espoir du ministère était clair : accréditer l’idée, véhiculée par les scissionnistes, que Nanterre-Droit était un échec et mettre fin à l’existence même d’une UER de droit à Nanterre. Cette espérance s’est écroulée devant la résistance qui lui a été opposée. Certes, la plupart des professeurs (une petite trentaine) sont partis ; mais les étudiants sont restés. 6000 inscriptions ont été enregistrées à la rentrée suivante, et le ministère a dû subir la honte d’un désaveu du Conseil d’Etat dans des termes qui ne souffraient d’aucune ambiguïté : le transfert de 34 emplois de professeurs, maîtres de conférences et maîtres-assistants sur 47 et de 16 emplois d’assistants sur 64 à une université qui comptait six fois moins d’étudiants, indiqua la Haute assemblée, privait indûment Nanterre des moyens indispensables à son fonctionnement et était constitutif d’une erreur manifeste d’appréciation.
L’UER de droit de Nanterre, devenue UfR après 1984 faisait ainsi la preuve des sentiments de fidélité et d’attachement qu’elle suscitait. L‘action déterminée des six professeurs restants, parmi lesquels Jean-Maurice Verdier, président de l’université, Gérard Couchez, directeur de l’UER, Géraud de la Pradelle ou Maurice Robin, des maîtres-assistants et des assistants restés fidèles, aidés par des collègues d’universités voisines, dont l’intervention, parfois désintéressée, a été décisive pour faire face à l’ampleur de la tâche, a permis la reconstruction rapide et le développement. Nombre de ceux issus de la nouvelle génération d’enseignants, au sein desquels Guy Carcassonne (qui avait d’ailleurs fait toutes ses études à Nanterre ) fait figure de symbole, ont résisté à toutes les sirènes qui cherchaient à les attirer ailleurs et sont restés fidèles à Nanterre jusqu’à leur retraite ou hélas ! jusqu’à leur mort.
Les troubles qui l’agitaient n’ont pas empêché l’UER de droit d’être à la pointe de l’évolution pédagogique : diversification du corps enseignant, qui s’est en particulier traduite dans le symbole qu’a été le recrutement du syndicaliste Eugène Descamps comme professeur associé de droit social ; mise en place des premières formes collectives de recherche, avec la création de l’IRERP, une nouveauté considérable au sein des facultés de droit ; organisation de nouvelles formes d’enseignement, associant de façon plus étroite professeurs et assistants devant les étudiants : tout cela contribuait à faire de Nanterre une « université phare », pour reprendre le titre d’un article du Figaro de l’époque..
Les années 80 ont donc ouvert une nouvelle étape dans l’histoire de notre UFR. Les relations avec la tutelle se sont pacifiées. Malgré son sous-encadrement relatif par rapport aux autres composantes de l’université, l’UFR de sciences juridiques, administratives et politiques s’est résolument placée à la pointe de l’évolution : suscitant la collaboration d’autres composantes de l’université, elle a su inventer des formations nouvelles, qui ont servi de modèle à bien des imitations, en particulier les formations droit-langues. C’est à l’activisme du vice-président Anelli que la filière anglo-américaine a pu se développer ; c’est grâce à l’esprit inventif et au dynamisme d’Otmar Seul, puissamment aidé par nos collègues de Münster et de Potsdam, que s’est mise en place la filière allemande, avant que ne se multiplient les diverses universités d’été tri ou quadrilatérales organisées à travers le monde entier. Yves Hamant a été longtemps l’animateur inlassable de la filière russe. Et on n’aura garde d’oublier les filières italienne et espagnole.
Avec les années 90, cependant, l’UfR a dû faire face, comme l’ensemble de l’université française, à des évolutions nouvelles. Elle a subi de plein fouet la crise liée à l’augmentation des effectifs, particulièrement sensible en droit ; c’est d’ailleurs cela qui a largement permis le maintien des effectifs de l’université, dans un contexte où d’autres disciplines connaissaient une crise de recrutement. Même la création d’antennes, qui seront à terme à l’origine de la création de deux nouvelles universités, à Cergy Pontoise et Versailles Saint Quentin, n’a pas effacé toutes les difficultés connues pour résoudre les questions liées à l’augmentation quantitative et à l’évolution qualitative du public étudiant. Quelques années plus tard, heureusement, le programme de grands travaux entrepris au tournant des années 90-2000 a permis à l’UfR de s’étendre au sein du bâtiment F et lui a donné ce qui lui avait cruellement fait défaut jusque là : un peu d’espace, cependant que la rénovation du cadre architectural permettait un fonctionnement plus harmonieux.
Ces difficultés n’ont pas empêché l’adaptation à la nouvelle politique ministérielle, caractérisée par l’accent mis sur l’importance de la politique de recherche. Le développement de centres et d’instituts de qualité a transformé l’activité traditionnelle, qui était restée très individuelle en action collective et cela s’est à la fois traduit dans la mise en place de nouvelles formations, tant théoriques que professionnelles, et dans une profonde transformation des relations avec les étudiants. L’ouverture d’une nouvelle page aux abords des années 2010 marquée par le départ concomitant à la retraite de nombreux enseignants et de nombreux cadres administratifs et le profond et brutal rajeunissement des personnels ne remet cependant pas en cause les évolutions antérieures : elle constitue au contraire une garantie de leur maintien et de leur épanouissement.
Notre UFR a fourni trois présidents (sur 10) à l’université de Nanterre ; trois de ses enseignants ont été recteurs d’académie ; elle a formé de nombreux cadres de la haute fonction publique et des diverses magistratures à tous les niveaux. Les prises de position de ses enseignants sont le plus souvent accueillies avec intérêt par les grands medias. Et l’on est toujours surpris, au fil des rencontres que l’on peut faire, y compris dans des pays lointains, d’entendre des gens vous dire qu’ils y ont étudié et vous exprimer le plaisir qu’ils y ont trouvé. Le droit ne faisant pas partie des disciplines favorites des grands classements internationaux, on n’y trouvera sans doute pas trace d’elle. Elle n’en est pas moins, dans le cadre français et européen, un des hauts lieux de la formation et de la recherche dans nos disciplines.
Jean-Marie Demaldent, ancien directeur de l’UfR SJAP (1988-1993)
André Legrand, ancien directeur de l’UfR SJAP (1996-1998), ancien président de l’université (1998-2003)
Jean-Maurice Verdier, ancien doyen de la Faculté de droit (1970), ancien président de l’université (1976-1981).
Cette décision, prise par les instances provisoires que l’on avait mises en place pour préparer les suites de mai 1968, n’avait rien de symbolique ; elle répondait à des enjeux concrets, dans la mesure où elle traduisait les divergences sur la politique universitaire qui s’étaient fait jour entre les deux entités antérieurement liées. Alors que les juristes parisiens se raidissaient de plus en plus sur des positions hostiles aux novations apportées par la nouvelle loi sur l’enseignement supérieur, Nanterre entendait clairement marquer sa volonté de s’inscrire dans le mouvement impulsé par celle-ci : partage du pouvoir universitaire et substitution au vieux modèle oligarchique traditionnel d’une gestion plus participative, donnant des responsabilités à toutes les catégories composant la communauté universitaire, et notamment aux étudiants ; mise en place de nouvelles formes pédagogiques, en particulier avec l’apparition du contrôle continu … Dans celle logique, la transformation de la faculté en Unité d’enseignement et de recherches et son intégration au sein de la nouvelle université de Paris X Nanterre allaient logiquement de soi.
Partie intégrante de l’université de Nanterre, l’UER de droit allait en accompagner l’évolution et partager d’autant plus toutes les vicissitudes qui accompagnaient son développement qu’elle en constituait, de par son importance, une partie essentielle. Elle allait être le théâtre de violences, liées aux oppositions internes entre les étudiants nanterrois, mais aussi aux tentatives d’intrusions d’étudiants venus d’autres universités parisiennes. Les heurts avec la police y ont parfois été graves et il a fallu tout le sang-froid des autorités décanales pour éviter le pire. Mais les difficultés allaient aussi prendre d’autres formes, à partir de 1975, avec l’arrivée au ministère d’Alice Saunier-Seïté, puis celle de Jean-Maurice Verdier à la présidence de l’université, et l’UER de droit allait, comme le reste de l’université, être l’objet de diverses manifestations d’hostilité de la part de la ministre.
Celle-ci devait prendre, à l’égard de l’UER de droit, des formes spécifiques. S’appuyant sur la volonté manifestée par la majorité des professeurs de droit de quitter Nanterre, le ministère allait organiser la scission, en créant une nouvelle UER de droit à Malakoff, rattachée à l’université de Paris V. L’espoir du ministère était clair : accréditer l’idée, véhiculée par les scissionnistes, que Nanterre-Droit était un échec et mettre fin à l’existence même d’une UER de droit à Nanterre. Cette espérance s’est écroulée devant la résistance qui lui a été opposée. Certes, la plupart des professeurs (une petite trentaine) sont partis ; mais les étudiants sont restés. 6000 inscriptions ont été enregistrées à la rentrée suivante, et le ministère a dû subir la honte d’un désaveu du Conseil d’Etat dans des termes qui ne souffraient d’aucune ambiguïté : le transfert de 34 emplois de professeurs, maîtres de conférences et maîtres-assistants sur 47 et de 16 emplois d’assistants sur 64 à une université qui comptait six fois moins d’étudiants, indiqua la Haute assemblée, privait indûment Nanterre des moyens indispensables à son fonctionnement et était constitutif d’une erreur manifeste d’appréciation.
L’UER de droit de Nanterre, devenue UfR après 1984 faisait ainsi la preuve des sentiments de fidélité et d’attachement qu’elle suscitait. L‘action déterminée des six professeurs restants, parmi lesquels Jean-Maurice Verdier, président de l’université, Gérard Couchez, directeur de l’UER, Géraud de la Pradelle ou Maurice Robin, des maîtres-assistants et des assistants restés fidèles, aidés par des collègues d’universités voisines, dont l’intervention, parfois désintéressée, a été décisive pour faire face à l’ampleur de la tâche, a permis la reconstruction rapide et le développement. Nombre de ceux issus de la nouvelle génération d’enseignants, au sein desquels Guy Carcassonne (qui avait d’ailleurs fait toutes ses études à Nanterre ) fait figure de symbole, ont résisté à toutes les sirènes qui cherchaient à les attirer ailleurs et sont restés fidèles à Nanterre jusqu’à leur retraite ou hélas ! jusqu’à leur mort.
Les troubles qui l’agitaient n’ont pas empêché l’UER de droit d’être à la pointe de l’évolution pédagogique : diversification du corps enseignant, qui s’est en particulier traduite dans le symbole qu’a été le recrutement du syndicaliste Eugène Descamps comme professeur associé de droit social ; mise en place des premières formes collectives de recherche, avec la création de l’IRERP, une nouveauté considérable au sein des facultés de droit ; organisation de nouvelles formes d’enseignement, associant de façon plus étroite professeurs et assistants devant les étudiants : tout cela contribuait à faire de Nanterre une « université phare », pour reprendre le titre d’un article du Figaro de l’époque..
Les années 80 ont donc ouvert une nouvelle étape dans l’histoire de notre UFR. Les relations avec la tutelle se sont pacifiées. Malgré son sous-encadrement relatif par rapport aux autres composantes de l’université, l’UFR de sciences juridiques, administratives et politiques s’est résolument placée à la pointe de l’évolution : suscitant la collaboration d’autres composantes de l’université, elle a su inventer des formations nouvelles, qui ont servi de modèle à bien des imitations, en particulier les formations droit-langues. C’est à l’activisme du vice-président Anelli que la filière anglo-américaine a pu se développer ; c’est grâce à l’esprit inventif et au dynamisme d’Otmar Seul, puissamment aidé par nos collègues de Münster et de Potsdam, que s’est mise en place la filière allemande, avant que ne se multiplient les diverses universités d’été tri ou quadrilatérales organisées à travers le monde entier. Yves Hamant a été longtemps l’animateur inlassable de la filière russe. Et on n’aura garde d’oublier les filières italienne et espagnole.
Avec les années 90, cependant, l’UfR a dû faire face, comme l’ensemble de l’université française, à des évolutions nouvelles. Elle a subi de plein fouet la crise liée à l’augmentation des effectifs, particulièrement sensible en droit ; c’est d’ailleurs cela qui a largement permis le maintien des effectifs de l’université, dans un contexte où d’autres disciplines connaissaient une crise de recrutement. Même la création d’antennes, qui seront à terme à l’origine de la création de deux nouvelles universités, à Cergy Pontoise et Versailles Saint Quentin, n’a pas effacé toutes les difficultés connues pour résoudre les questions liées à l’augmentation quantitative et à l’évolution qualitative du public étudiant. Quelques années plus tard, heureusement, le programme de grands travaux entrepris au tournant des années 90-2000 a permis à l’UfR de s’étendre au sein du bâtiment F et lui a donné ce qui lui avait cruellement fait défaut jusque là : un peu d’espace, cependant que la rénovation du cadre architectural permettait un fonctionnement plus harmonieux.
Ces difficultés n’ont pas empêché l’adaptation à la nouvelle politique ministérielle, caractérisée par l’accent mis sur l’importance de la politique de recherche. Le développement de centres et d’instituts de qualité a transformé l’activité traditionnelle, qui était restée très individuelle en action collective et cela s’est à la fois traduit dans la mise en place de nouvelles formations, tant théoriques que professionnelles, et dans une profonde transformation des relations avec les étudiants. L’ouverture d’une nouvelle page aux abords des années 2010 marquée par le départ concomitant à la retraite de nombreux enseignants et de nombreux cadres administratifs et le profond et brutal rajeunissement des personnels ne remet cependant pas en cause les évolutions antérieures : elle constitue au contraire une garantie de leur maintien et de leur épanouissement.
Notre UFR a fourni trois présidents (sur 10) à l’université de Nanterre ; trois de ses enseignants ont été recteurs d’académie ; elle a formé de nombreux cadres de la haute fonction publique et des diverses magistratures à tous les niveaux. Les prises de position de ses enseignants sont le plus souvent accueillies avec intérêt par les grands medias. Et l’on est toujours surpris, au fil des rencontres que l’on peut faire, y compris dans des pays lointains, d’entendre des gens vous dire qu’ils y ont étudié et vous exprimer le plaisir qu’ils y ont trouvé. Le droit ne faisant pas partie des disciplines favorites des grands classements internationaux, on n’y trouvera sans doute pas trace d’elle. Elle n’en est pas moins, dans le cadre français et européen, un des hauts lieux de la formation et de la recherche dans nos disciplines.
Jean-Marie Demaldent, ancien directeur de l’UfR SJAP (1988-1993)
André Legrand, ancien directeur de l’UfR SJAP (1996-1998), ancien président de l’université (1998-2003)
Jean-Maurice Verdier, ancien doyen de la Faculté de droit (1970), ancien président de l’université (1976-1981).
Mis à jour le 26 novembre 2019